Cette femme de 38 ans, qu’on ne peut identifier en raison d’une ordonnance de non-publication qui protège l’identité de son enfant, était accusée d’avoir omis de fournir les choses nécessaires à l’existence d’un enfant de moins de 16 ans. Selon le rapport d’évaluation de la psychiatre Marie-Frédérique Allard, la femme était dans un état de psychose, due à son diagnostic de schizophrénie, lors des tristes événements du premier jour de 2025.
«La responsabilité criminelle de madame n’était pas engagée. Lors des événements, elle était atteinte de troubles mentaux qui sont décrits au rapport. On parle de troubles psychotiques primaires sévères.»
— Matthieu Poliquin, juge de la Cour du Québec
Lors de la cause entendue mardi après-midi au palais de justice de Trois-Rivières, Me Martine Tessier a rappelé les faits qui se sont déroulés il y a moins de cinq mois.
Les policiers sont d’abord appelés à intervenir auprès d’une femme qui semble se soulager dans un abribus au coin des rues Royale et De La Vérendrye. Lors de la première intervention vers 14 h 11, les policiers reconnaissent cette femme sans domicile fixe qui mentionne avoir mal au ventre. Elle refuse de recevoir des soins de santé et demande fermement qu’on la laisse tranquille. À ce moment, les policiers ne constatent aucune blessure ni aucun saignement sur le corps de cette femme qui se parle à elle-même.
À 15 h 07, les policiers sont de nouveau appelés au centre-ville trifluvien pour une femme qui vient d’accoucher. Les informations fournies aux patrouilleurs amènent ces derniers à faire le lien avec la première intervention.
Coin Royale et Bureau, les policiers voient une voiture immobilisée avec à son bord une passante ayant été témoin des événements et un bébé naissant enroulé dans une couverture.
Selon les informations recueillies auprès de témoins, la tête du bébé aurait heurté le trottoir lorsque sa mère a arraché le cordon ombilical. La femme lui aurait donné des coups de pied en disant qu’elle ne veut pas d’un bébé et le dissimule sous des feuilles mortes avant de prendre la fuite. Elle est rattrapée peu de temps après par les policiers.
L’accusée a reconnu avec calme les faits présentés au juge Poliquin, la défense ayant admis la preuve de la poursuite lors de ce procès par admission. La poursuite a pour sa part reconnu l’expertise de la psychiatre ayant conclu à la non-responsabilité criminelle, la défense ayant abordé son travail sous cet angle.
Elle le croyait mort
Le bébé est venu au monde à la 30e semaine de grossesse. La dame ignorait qu’elle était enceinte. Elle s’était toutefois rendue à l’hôpital à deux reprises entre août et décembre 2024 pour des maux de ventre. On ne lui a pas fait passer de test de grossesse, d’autres problèmes pouvant expliquer ses douleurs.
Selon ce qu’elle a raconté aux policiers lors de son hospitalisation suivant son arrestation, elle croyait que le bébé était mort, car il ne bougeait pas à la suite de l’accouchement et il n’a pas pleuré. Le bébé a survécu.
Le fait d’accoucher dans la rue sans savoir qu’elle était enceinte a ajouté une couche de stress à sa situation précaire, ce qui a contribué à la difficulté de prendre des décisions rationnelles. Son test de dépistage de drogues de rue subi à l’hôpital a été négatif même si la femme a reconnu avoir consommé durant sa grossesse.
Me Sandra Bonanno a rappelé à la cour que sa cliente est dans les portes tournantes de la justice et de la santé mentale depuis une vingtaine d’années. En rupture de services au moment des faits, elle vivait dans la rue depuis plus d’un an après avoir demeuré dans une ressource supervisée.
Détenue depuis janvier 2025, la femme doit demeurer à l’hôpital et centre d’hébergement en santé mentale de Shawinigan afin de recevoir les soins nécessaires à sa condition. Son état s’est amélioré, mais elle demeure en proie à des troubles perceptuels, à de l’irritabilité et à une certaine désorganisation de la pensée, ce qui va nécessiter un hébergement dans un milieu approprié après son séjour à l’hôpital.
Elle est en attente d’une évaluation de la Commission d’examen des troubles mentaux qui décidera si elle peut être remise en liberté, sous certaines conditions, ou non.