« Les deux bras me sont tombé, dit M. Huard, directeur général de Transport Gino Bois inc. [...] À quoi il a pensé? Jamais on n’aurait pensé qu’il aurait pu faire quelque chose de semblable. »
En juillet 2021, Steeve Gagnon a commencé à travailler pour ce transporteur qui charrie des copeaux, des sciures et des écorces des scieries aux papetières. Gagnon accomplissait son travail sans problème, mais fraternisait très peu avec ses collègues, selon Serge Huard. « C’était un gars très renfermé, qui ne parlait pas beaucoup. »

Après environ un an à sillonner les routes pour la compagnie, Steeve Gagnon a brusquement cessé de travailler. En août 2022, «il nous est arrivé avec un papier du médecin comme quoi il s’était fait mal chez lui, sans trop d’explications, dit Serge Huard. Et on ne l’a jamais revu après.»
«Il n’avait jamais de visite»
Alors qu’il était en congé de maladie, Steeve Gagnon habitait un appartement au deuxième étage d’un immeuble délabré de la rue Desbiens, à Amqui.
Samuel, son voisin du dessous, se souvient lui aussi d’un homme isolé. «Il avait l’air souvent tout seul, dit Samuel. J’entendais: il n’avait jamais de visite.»
Lorsqu’il le croisait dehors, Samuel échangeait parfois des banalités avec Steeve Gagnon, jasant surtout de météo. Samuel se souvient que Steeve Gagnon lui avait mentionné qu’il était en «arrêt de travail».
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Samuel se souvient aussi qu’il voyait la camionnette Ford F-150 de son voisin garée dans le stationnement du garage — la même camionnette, croit-il, qui a servi à perpétrer l’attaque meurtrière sur le boulevard Saint-Benoît Ouest, à Amqui.
Mardi, en réalisant que Steeve Gagnon était l’homme soupçonné d’avoir heurté délibérément plusieurs piétons sur le boulevard Saint-Benoit Ouest, Samuel s’en est voulu de ne pas avoir cogné chez son voisin.
«Je me suis senti mal personnellement de ne jamais avoir pris la peine de lui rendre visite, dit-il. On ne sait jamais, ce sont des petits gestes qui font la différence.»
— Samuel
Gaétan Tremblay, qui habite la maison voisine de l’immeuble où résidait Steeve Gagnon sur la rue Desbiens, se souvient de lui comme un homme «étrange». Il dit l’avoir vu plusieurs fois faire de courts aller-retours sur le trottoir en face de chez lui, sans objectif apparent. Il semblait «complètement sur une autre planète», dit M. Tremblay.
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À Saint-Léon-le-Grand, village voisin d’Amqui, où il a habité plusieurs années, un membre de la famille de Steeve Gagnon a refusé de nous parler. «Pas de commentaire», a-t-il dit, avant de nous claquer la porte au nez.
Formellement accusé
Mardi après-midi, Steeve Gagnon, 38 ans, a été formellement accusé de conduite dangereuse ayant causé la mort, en lien avec l’attaque à la camionnette qui a tué deux piétons et en a blessé gravement neuf autres à Amqui, dont trois qui sont dans un état critique.
Menotté, le regard fugace, balançant légèrement son corps dans le box des accusés, Steeve Gagnon a comparu au palais de justice d’Amqui. Aucune accusation de meurtre n’a pour le moment été portée contre lui. «Il y aura assurément d’autres chefs à venir», a indiqué le procureur de la Couronne, Simon Blanchette.
Précision
Contrairement à ce qui écrit écrit dans une première version de ce texte, il n'y avait pas un seul lit mais deux.
Steeve Gagnon reviendra devant la justice, le 5 avril. La porte-parole du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), Audrey Roy-Cloutier, a également indiqué que d’autres chefs d’accusation pourraient être déposés avec l’enquête qui se poursuit.
L’accusé n’avait pas un profil criminalisé avant sa comparution mardi. Son dernier antécédent remontait à 2007. Il avait alors été reconnu coupable de conduite avec les facultés affaiblies et avait perdu son permis durant un an.
«CHAROGNE»
À son arrivée au palais de justice, Steeve Gagnon a reçu plusieurs insultes de la foule. En réaction, il a semblé esquisser un léger sourire. Les insultes ont commencé à fuser à la sortie du palais de justice, avant que Steeve Gagnon remonte dans la voiture de police. «Ostie de charogne, tu vas trouver ça dur en prison!», a par exemple crié un homme dans la foule.
Steeve Gagnon s’est rendu lui-même aux policiers lundi après-midi et a avoué rapidement son geste, selon le sergent Claude Doiron, de la Sûreté du Québec.
«Il était en état de conduire, mais qu’en est-il de son état d’esprit au moment où il a posé ces gestes? Cela reste à évaluer.»